Plan de la fiche sur le SupplĂ©ment au voyage de Bougainville de Diderot Introduction SupplĂ©ment au voyage de Bougainville, de Denis Diderot, fait rĂ©fĂ©rence au voyage de l'explorateur Bougainville en OcĂ©anie. Ce texte soulĂšve le problĂšme du colonialisme et cĂ©lĂšbre la vie sauvage par rapport Ă l'homme civilisĂ©, ici dĂ©nigrĂ©. Dans cet extrait, Denis Diderot met en scĂšne un vieillard qui se prĂ©sente comme Ă©tant indiffĂ©rent au dĂ©part des blancs. Au moment de ce dĂ©part, il prononce un discours violent divisĂ© en deux parties dans la premiĂšre, il s'adresse tout d'abord aux Tahitiens puis dans la deuxiĂšme, il s'adresse directement Ă Bougainville. Dans ce texte, Diderot souligne l'opposition entre deux nations, les qualitĂ©s des Tahitiens devant les dĂ©fauts de la culture blanche. Nous verrons en quoi ce discours prĂ©sente les mĂ©faits de la civilisation, fait un Ă©loge de la vie naturelle et sur quoi repose sa force oratoire. ProblĂ©matique possible Comment Diderot va-t-il comparer les deux types de civilisation ? Denis Diderot Texte Ă©tudiĂ©Texte complet de SupplĂ©ment au voyage de Bougainville - Diderot pdf TĂ©lĂ©charger cet extrait du SupplĂ©ment au voyage de Bougainville - de Diderot en version audio clic droit - "enregistrer sous..." Lu par RenĂ© Depasse- source Au dĂ©part de Bougainville, lorsque les habitants accouraient en foule sur le rivage, s'attachaient Ă ses vĂȘtements, serraient ses camarades entre leurs bras, et pleuraient, ce vieillard s'avança d'un air sĂ©vĂšre, et dit "Pleurez, malheureux Tahitiens ! pleurez ; mais que ci soit de l'arrivĂ©e, et lion du dĂ©part de ces hommes ambitieux et mĂ©chants un jour, vous les connaĂźtrez mieux. Un jour, ils reviendront, le morceau de bois que vous voulez attachĂ© Ă la ceinture de celui-ci, dans une main, et le fer qui pend au cĂŽtĂ© de celui-lĂ , dans l'autre, vous enchaĂźner, vous Ă©gorger, ou vous assujettir Ă leurs extravagances et Ă leurs vices ; un jour vous servirez sous eux aussi corrompus, aussi vils, aussi malheureux qu'eux Mais je me console ; je touche Ă la fin de ma carriĂšre ; et la calamitĂ© que je vous annonce, je ne la verrai point. Tahitiens ! ĂŽ mes amis ! vous auriez un moyen d'Ă©chapper Ă un funeste avenir ; mais j'aimerais mieux mourir que de vous eu donner le conseil. Qu'ils s'Ă©loignent, et qu'ils vivent." Puis s'adressant Ă Bougainville, il ajouta "Et toi, chef des brigands qui t'obĂ©issent, Ă©carte promptement ton vaisseau de notre rive nous sommes innocents, nous sommes heureux ; et tu ne peux que nuire Ă notre bonheur. Nous suivons le pur instinct de la nature ; et tu as tentĂ© d'effacer de nos Ăąmes son caractĂšre. Ici tout est Ă tous ; et tu nous as prĂȘchĂ© je ne sais quelle distinction du tien et du mien. Nos filles et nos femmes nous sont communes ; tu as partagĂ© ce privilĂšge avec nous ; et tu es venu allumer en elles des fureurs inconnues. Elles sont devenues folles dans tes bras ; tu es devenu fĂ©roce entre les leurs. Elles ont commencĂ© Ă se haĂŻr ; vous vous ĂȘtes Ă©gorgĂ©s pour elles ; et elles nous sont revenues teintes de votre sang. Nous sommes libres ; et voilĂ que tu as enfoui dans notre terre le titre de notre futur esclavage. Tu n'es ni un dieu, ni un dĂ©mon qui es-tu donc, pour faire des esclaves ? 0rou ! toi qui entends la langue de ces hommes-lĂ , dis-nous Ă tous, comme tu me l'as dit Ă moi-mĂȘme, ce qu'ils ont Ă©crit sur cette lame de mĂ©tal Ce pays est Ă nous. Ce pays est Ă toi ! et pourquoi ? parce que tu y as mis le pied ? Si un Tahitien dĂ©barquait un jour sur vos cĂŽtes, et qu'il gravĂąt sur une de vos pierres ou sur l'Ă©corce d'un de vos arbres Ce pays est aux habitants de Tahiti, qu'en penserais-tu ? Tu es le plus fort ! Et qu'est-ce que cela fait ? Lorsqu'on t'a enlevĂ© une des mĂ©prisables bagatelles dont ton bĂątiment est rempli, tu t'es rĂ©criĂ©, tu t'es vengĂ© ; et dans le mĂȘme instant tu as projetĂ© au fond de ton cĆur le vol de toute une contrĂ©e ! Tu n'es pas esclave tu souffrirais plutĂŽt la mort que de l'ĂȘtre, et tu veux nous asservir ! Tu crois donc que le Tahitien ne sait pas dĂ©fendre sa libertĂ© et mourir ? Celui dont tu veux t'emparer comme de la brute, le Tahitien est ton frĂšre. Vous ĂȘtes deux enfants de la nature ; quel droit as-tu sur lui qu'il n'ait pas sur toi ? Tu es venu ; nous sommes-nous jetĂ©s sur ta personne ? avons-nous pillĂ© ton vaisseau ? t'avons-nous saisi et exposĂ© aux flĂšches de nos ennemis ? t'avons-nous associĂ© dans nos champs au travail de nos animaux ? Nous avons respectĂ© notre image en toi. Laisse nous nos mĆurs ; elles sont plus sages et plus honnĂȘtes que les tiennes ; nous ne voulons point troquer ce que tu appelles notre ignorance, contre tes inutiles lumiĂšres. Tout ce qui nous est nĂ©cessaire et bon, nous le possĂ©dons. Sommes-nous dignes de mĂ©pris, parce que nous n'avons pas su nous faire des besoins superflus ? Lorsque nous avons faim, nous avons de quoi manger ; lorsque nous avons froid, nous avons de quai nous vĂȘtir. Tu es entrĂ© dans nos cabaties, qu'y manque-t-il, Ă ton avis ? Poursuis jusqu'oĂč tu voudras ce que tu appelles commoditĂ©s de la vie ; mais permets Ă des ĂȘtres sensĂ©s de s'arrĂȘter, lorsqu'ils n'auraient Ă obtenir, de la continuitĂ© de leurs pĂ©nibles efforts, titre des biens imaginaires. Si tu nous persuades de franchir l'Ă©troite limite du besoin, quand finirons-nous de travailler ? Quand jouirons-nous ? Nous avons rendu la somme de nos fatigues annuelles et journaliĂšres la moindre qu'il Ă©tait possible, parce que rien ne nous paraĂźt prĂ©fĂ©rable au repos. Va dans ta contrĂ©e t'agiter, te tourmenter tant que tu voudras ; laisse-nous reposer ne nous entĂȘte lĂ de tes besoins factices, ni de tes vertus chimĂ©riques. SupplĂ©ment au voyage de Bougainville extrait - Diderot Annonce des axes I. Les mĂ©faits de la civilisation 1. Destruction et immoralitĂ© des colons 2. L'injustice et l'immoralitĂ© II. L'Ă©loge de la vie naturelle 1. Un monde d'innocence et de bonheur 2. Un monde de libertĂ© et de tolĂ©rance 3. Un monde d'Ă©galitĂ© III. La force oratoire du texte 1. Un discours structurĂ© 2. Des procĂ©dĂ©s pour convaincre Commentaire littĂ©raire I. Les mĂ©faits de la civilisation 1. Destruction et immoralitĂ© des colons Diderot qualifie les hommes civilisĂ©s de "mĂ©chants". Il utilise un champ lexical fort pour souligner cette cruautĂ© avec des verbes comme "enchaĂźner", "Ă©gorger", "assujettir", "se haĂŻr", "asservir"⊠Ce champ lexical renforce l'attitude des EuropĂ©ens envers les Tahitiens et Diderot dĂ©veloppe le champ lexical de la violence "funeste avenir", "fureurs inconnues", "folles", "fĂ©roces", "esclaves" et "teintes de sang". Les mots sont appuyĂ©s grĂące Ă des Ă©numĂ©rations et rĂ©pĂ©titions. L'auteur utilise Ă©galement le passĂ© composĂ© qui renforce le caractĂšre nocif des EuropĂ©ens et s'accompagne d'un processus de cause Ă effet "tu as tentĂ© d'effacer". GrĂące aux champs lexicaux de la violence et de la guerre, Diderot dresse ainsi un portrait rĂ©aliste et sans concession du comportement des EuropĂ©ens face aux Tahitiens. Diderot emploie aussi des termes qui connotent le mĂ©pris "vis", "corrompus", "vils", "ambitieux" qui renvoient Ă la question rhĂ©torique "Sommes-nous dignes de mĂ©pris ?" => mise en cause du bien-fondĂ© de la colonisation. 2. L'injustice et l'immoralitĂ© L'injustice et l'immoralitĂ© dont font preuve les EuropĂ©ens sont marquĂ©es ici par l'intrusion de la notion de possession. On a aussi l'Ă©mergence de besoins nouveaux des besoins factices qui crĂ©ent une hiĂ©rarchie, une jalousie. Cette injustice se traduit par l'application de la loi du plus fort dĂšs l'arrivĂ©e des occidentaux "ce pays est Ă nous". Le vieillard s'indigne d'un tel comportement de la part des occidentaux "ce pays est Ă toi ? Et pourquoi ?" et s'exprime grĂące Ă un renversement de situation hypothĂ©tique qui montre l'illĂ©gitimitĂ© de cette situation. Cette loi du plus fort est ainsi en totale opposition Ă la loi naturelle dĂ©fendue par l'auteur dans la seconde partie du discours. Diderot nous montre que le pouvoir et la propriĂ©tĂ© entraĂźnent l'injustice et la jalousie "je ne sais quelleâŠ", par cette phrase il met en avant la haine entre les membres de la sociĂ©tĂ© "allument des fureurs inconnues", "femmes folles", "fĂ©roces", "haĂŻr". Ainsi, Diderot s'oppose ainsi Ă la civilisation que tentent d'imposer les colons et rejette la colonisation que pratiquent ces derniers. II. L'Ă©loge de la vie naturelle La vie naturelle est prĂ©sentĂ©e dans ce texte sur 4 valeurs essentielles tolĂ©rance, innocence, libertĂ© et Ă©galitĂ©. 1. Un monde d'innocence et de bonheur Diderot dĂ©fend une sociĂ©tĂ© s'appuyant sur l'innocence et entraĂźnant un bonheur "nous sommes innocents, nous sommes heureux". Le fait que les Tahitiens soient innocents ignorants du point de vue des EuropĂ©ens est la raison de leur bonheur => Bonheur simple. Ce bonheur est rattachĂ© Ă la nature "nous suivons le pur instinct de la nature" => renvoie Ă Rousseau dĂ©fenseur de cette cause. Une des causes de ce bonheur est le fait que l'on est en rĂ©gime de co-propriĂ©tĂ© "tout est Ă tous" et "nos mĆurs sont plus sages et plus honnĂȘtes que les tiennes". Ce que les EuropĂ©ens appellent l'ignorance est en fait une innocence qui Ă©quivaut Ă une sagesse et est source de bonheur. Diderot insiste fortement sur l'absence de superflu Ă la fin de cet extrait "Tout ce qui est ⊠possĂ©dons", "lorsque nous avons faim ⊠vĂȘtir". Ils revendiquent un minimum qui rend la vie facile le bien ĂȘtre et le repos sont mis en Ă©loge "laisse nous-reposer". 2. Un monde de libertĂ© et de tolĂ©rance L'auteur dĂ©fend Ă©galement les concepts de libertĂ© et de tolĂ©rance "nous sommes libres". La libertĂ© se manifeste Ă©galement en opposition au terme "esclavage" et Ă travers le souci de tolĂ©rance la comprĂ©hension d'autrui est marquĂ©e par l'expression "nous avons respectĂ© l'image qui est en toi" et aussi par les questions rhĂ©toriques "quel droit as-tu sur lui qu'il n'ait pas sur toi ?", etc.. 3. Un monde d'Ă©galitĂ© Les Tahitiens sont les dĂ©fenseurs de l'Ă©galitĂ© entre les hommes. "le Tahitien est ton frĂšre." Cette Ă©galitĂ© est vue par les Tahitiens comme une loi fondamentale de la Nature "Vous ĂȘtes deux enfants de la nature ; quel droit as-tu sur lui qu'il n'ait pas sur toi ?" => ceci est gĂ©nĂ©ralement une revendication des LumiĂšres europĂ©ennes, alors que ici c'est le supposĂ© sauvage qui revendique cette Ă©galitĂ© entre les hommes. III. La force oratoire du texte 1. Un discours structurĂ© Le discours est divisĂ© en deux paragraphes dans le premier, le discours s'adresse aux Tahitiens et dans le second, il s'adresse directement au navigateur Bougainville. Dans la premiĂšre partie de ce discours, on remarque qu'il y a un jeu d'opposition entre "vous" et "eux" "un jour vous les connaĂźtrez mieux", "aussi malheureux qu'eux", "vous servirez sous eux" et en face "ils" dĂ©signent les "hommes ambitieux et mĂ©chants". Puis dans le second paragraphe, le pronom "nous" dĂ©signe le vieillard et les Tahitiens et le pronom "tu" dĂ©signe le chef de ces "brigands". Ces deux pronoms s'opposent "Et toi, chef des brigands qui t'obĂ©issent" et "nous sommes innocents"; "nous sommes heureux " et "tu ne peux nuire Ă notre bonheur"⊠Cette opposition marque leur style de vie. Il y a une interpellation de la personne par ce jeu d'interpellations. 2. Des procĂ©dĂ©s pour convaincre Le vieillard utilise de nombreuses questions rhĂ©toriques. Il utilise Ă©galement l'impĂ©ratif. Il utilise des sonoritĂ©s Ă©vocatives, par exemple "Et toi, chef des brigands qui t'obĂ©issent, Ă©carte promptement ton vaisseau de notre rive" => allitĂ©rations agressives en [t] et en [r] pour parler des colons. "nous sommes innocents, nous sommes heureux" => sonoritĂ©s beaucoup plus douces pour parler des Tahitiens. La structure symĂ©trique permet de souligner une fois de plus l'opposition entre ces deux peuples que tout oppose "elles sont devenues folles dans tes bras ; tu es devenu fĂ©roce entre les leurs". La symĂ©trie cherche Ă renforcer l'hypothĂšse inversĂ©e le vieillard met les EuropĂ©ens Ă la place des Tahitiens. Il utilise Ă©galement des questions oratoires Ă la fin de cet extrait, dont la rĂ©ponse Ă partir de "ce pays est Ă toi !... Avons-nous pillĂ© ton vaisseau ?". Ces questions animent le discours et elles montrent l'assurance du vieillard. Conclusion Diderot par la voix d'un vieillard, dĂ©nonce ici une sociĂ©tĂ© colonisatrice, injuste, immorale, violente face Ă un monde libre, simple, et tolĂ©rant aux autres. Les propos du vieux Tahitien, qui incarne le mythe du "bon sauvage", laissent transparaĂźtre la critique acerbe de Diderot. La phrase rĂ©probatrice "Qui es-tu donc pour faire des esclaves ?" unit les aspects principaux en condamnant l'esclavage, Diderot dĂ©fend les droits de l'homme, tout d'abord la libertĂ© de l'individu, mais il exprime aussi l'opinion selon laquelle les Français n'ont pas de justification raisonnable pour leurs menĂ©es impĂ©rialistes. En outre, il fait une apologie des mĆurs des Tahitiens, menacĂ©es par la civilisation occidentale. Il montre que le comportement prĂ©tentieux des colonisateurs est Ă l'opposĂ© des valeurs des LumiĂšres et n'a pas de place dans une sociĂ©tĂ© Ă©clairĂ©e. Ce texte s'appuie sur toutes les ressources de l'art oratoire pour faire triompher son point de vue, celui de l'esprit des lumiĂšres, c'est-Ă -dire le combat pour la libertĂ©, la tolĂ©rance et l'Ă©galitĂ©. Diderot propose Ă Rousseau une morale sociale et rĂ©habilite l'idĂ©e que ce qui est naturel est spontanĂ©ment vertueux. Cette rĂ©flexion s'inscrit dans le dĂ©bat du XVIIIĂšme siĂšcle oĂč l'individu est au cĆur d'une sociĂ©tĂ© dĂ©naturĂ©e.
Retrouvezl'ebook SupplĂ©ment au voyage de Bougainville de Denis Diderot de Fanny Normand - Ăditeur Format ePub - Librairie Decitre votre prochain livre est lĂ Apparemment, javascript est dĂ©sactivĂ© sur votre navigateur.Dialogue Ă©crit par Denis Diderot, paru en 1772. En 1771, le navigateur français Bougainville publie son Voyage autour du monde. Le dialogue de Diderot est une rĂ©action Ă ce rĂ©cit de voyage. Il y dĂ©veloppe ses propres rĂ©flexions Ă propos de la colonisation, l'esclavage, la libertĂ©, etc. Dans ce texte, prĂ©sentĂ© sous la forme d'un dialogue, il est question d'un vieux Tahitien, qui adresse plein de reproches Ă Bougainville et Ă ses intentions de coloniser Tahiti. Les propos du vieux Tahitien, qui incarne le mythe du bon sauvage », laissent transparaĂźtre la critique acerbe de Diderot. La phrase rĂ©probatrice Qui es-tu donc pour faire des esclaves » unit les aspects principaux en condamnant l'esclavage, Diderot dĂ©fend les droits de l'homme, tout d'abord la libertĂ© de l'individu, mais il exprime aussi l'opinion selon laquelle les Français n'ont pas de justification raisonnable pour leurs menĂ©es impĂ©rialistes. En outre, il fait une apologie des mĆurs des Tahitiens, menacĂ©es par la civilisation occidentale. Il montre que le comportement prĂ©tentieux des colonisateurs est Ă l'opposĂ© des valeurs des LumiĂšres et n'a pas de place dans une sociĂ©tĂ© Ă©clairĂ©e. Le dialogue entre l'aumĂŽnier et Orou est d'ailleurs une critique des dĂ©rives de la religion catholique. La plateforme qui connecte profs particuliers et Ă©lĂšves Vous avez aimĂ© cet article ? Notez-le ! Agathe Professeur de langues dans le secondaire, je partage avec vous mes cours de linguistique !
Publisher Description Cette fiche de lecture sur le Supplément au voyage de Bougainville de Diderot propose une analyse complÚte un résumé du Supplément au Voyage de Bougainvilleune analyse des personnages une analyse des thÚmes et axes de lectureAppréciée des lycéens, cette fiche de lecture sur Le Supplément au Voyage de Bougainville de Diderot a été rédigée par un professeur de propos de propose plus 2500 analyses complÚtes de livres sur toute la littérature classique et contemporaine des résumés, des analyses de livres, des questionnaires et des commentaires composés, etc. Nos analyses sont plébiscitées par les lycéens et les enseignants. Toutes nos analyses sont téléchargeables directement en ligne. FichesdeLecture est partenaire du MinistÚre de l' d'informations sur More Books by Sophie Lecomte &
Bienvenuedans la collection Les Fiches de lecture d'Universalis La genĂšse et l'Ă©dition des Ćuvres de Diderot (1713-1784) sont souvent complexes et problĂ©matiques : comme le Paradoxe sur le comĂ©dien (conçu en 1769, publiĂ© en 1830), le SupplĂ©ment au Voyage de Bougainville n'est Ă l'origine qu'un compte rendu de lecture destinĂ© Ă La Correspondance
Denis Diderot par Van Loo 1767 Textes Ă©tudiĂ©s SynthĂšses incipit chapitre I, texte 2 discours du vieillard tahitien dialogue Orou / lâaumĂŽnier apologue de Polly Baker excipit Structure du SupplĂ©ment le vrai » voyage de Bougainville Le SupplĂ©ment a-t-il un caractĂšre ethnographique ? Bibliographie Structure du SupplĂ©ment⊠Chapitre I p. 141-147 Ă©ditions GF Dialogue entre A et B Petite introduction variation sur le temps quâil fait 1/2 page Jugement sur Bougainville les raisons de son expĂ©dition 1/2 page RĂ©flexion sur les observations quâil rapporte RĂ©flexion sur les rĂ©actions dâun Tahitien que Bougainville ramena en France celui-ci sây est ennuyĂ©, et juge fous les EuropĂ©ens transition Ăš cf. Montaigne Les Cannibales PrĂ©sentation du SupplĂ©ment on annonce la lecture de ce livre, et en particulier les adieux du vieillard. Chapitre II p. 147-153 PrĂ©sentation du vieillard, et son discours environ 5 pages =>Texte 1 Dialogue de A et B sur ce discours Accueil des Tahitiens aux EuropĂ©ens incident de la jeune femme dĂ©guisĂ©e Annonce du dialogue entre Orou et lâaumĂŽnier. Chapitre III p. 153-167 B lit Ă A le dialogue entre Orou et lâaumĂŽnier. LâaumĂŽnier refuse lâoffre dâOrou, puis cĂšde malgrĂ© lui ; 2Ăšme discussion entre Orou et lâaumĂŽnier ce dernier tente de faire comprendre au Tahitien ce que sont la religion, la prĂȘtrise, les lois de son pays. Orou Ă son tour explique les lois et coutumes de Tahiti Ăš Texte 2 p. 155-157 lâaumĂŽnier tente dâexpliquer ce quâest Dieu dialogue p. 157-159 discours dâOrou, les objections de la raison p. 159-160 lâaumĂŽnier rĂ©pond aux objections et aux questions dâOrou dialogue p. 161-164 Orou Ă son tour explique ses lois discours + dialogue. Interruption de A ; aprĂšs une explication de B, intermĂšde B prĂ©cise les lois de Tahiti B raconte lâhistoire de Polly Baker, par antithĂšse avec le dialogue prĂ©cĂ©dent entre Orou et lâaumĂŽnier Ăš texte 3 ; rĂ©flexions de B et de A. p. 165-167 Chapitre IV p. 167-177 Nouveau dialogue entre Orou et lâaumĂŽnier Orou voit ses valeurs contestĂ©es par celles de lâaumĂŽnier, et surtout vice-versa p. 175 deux systĂšmes de valeurs sâopposent ; Condamnation de la religion et de la vie monacale par Orou cf. Diderot, La Religieuse. Fin du chapitre lâaumĂŽnier, agitĂ© de remords, cĂšde comiquement cf. la veine libertine du 18Ăšme siĂšcle, de Laclos Ă CrĂ©billon et aux Bijoux indiscrets⊠sans parler de Sade. Chapitre V p. 177-186 Dialogue entre A et B. B raconte les conclusions de lâaumĂŽnier consĂ©quences de ces coutumes et de ces valeurs morales ; La seule loi raisonnable est la loi de nature ; Ce quâil y a de naturel et de frelatĂ© dans lâamour Ă lâEuropĂ©enne ; Avantages et inconvĂ©nients de la vie civilisĂ©e et de la vie sauvage » faut-il choisir ? faut-il une rĂ©volution ? Lâattitude du sage Ăš texte 4 On passe donc dâune critique du colonialisme, injustifiĂ© â illusion de croire en une supĂ©rioritĂ© europĂ©enne â Ă une critique de la religion, de la sociĂ©tĂ©, des distorsions entre loi naturelle, loi sociale, loi religieuse, qui mĂšnent Ă des absurditĂ©s et Ă des dĂ©chirements moraux, et enfin Ă une critique des valeurs morales non fondĂ©es sur la raison et la nature, donc injustifiables. Mais cette condamnation ne doit pas conduire Ă une rĂ©volution violente, qui ne ferait que changer une dictature en une autre. Le livre lui-mĂȘme, par la critique quâil apporte, est action, la seule valable. Chapitre I, p. 141-142 jusquâĂ langue des marins » Cette 1Ăšre partie est un jugement littĂ©raire pour lâessentiel, un article que Diderot avait Ă©crit Ă la demande de Grimm sur le Voyage de Bougainville, et qui nâa pas Ă©tĂ© publiĂ©. Deux parties jusquâĂ toujours » jusquâĂ la langue des marins » Cf. Mme de la CarliĂšre, dialogue oĂč deux interlocuteurs parlaient du temps dans les mĂȘmes termes, qui Ă©tait une rĂ©flexion sur la libertĂ© sexuelle, dans un dĂ©cor identique. Cette discussion physique et mĂ©tĂ©orologique rappelle Fontenelle Irons-nous sur la lune ? », Entretien sur la pluralitĂ© des mondes Le dialogue est placĂ© sous le signe de la dĂ©ception ne nous a pas tenu parole », l. 3, liĂ©e au brouillard qui gĂȘne la vue paysage symbolique. Le dialogue est placĂ© sous le signe de la luciditĂ©. La rĂ©flexion prolonge celle de Montaigne le Tahitien rappelle le Cannibale des Essais. RĂ©flexion sur la diversitĂ© des mĆurs. Les mĆurs françaises paraissent plus Ă©tranges que les mĆurs Ă©trangĂšres. traverse lâĂ©ponge » l. 10 air saturĂ© dâeau que le brouillard peut ou non traverser. Que reprĂ©sentent les interlocuteurs ? A est-il lâopinion commune ? A diffĂšre de B par son caractĂšre A est impatient et pessimiste, B patient et optimiste. Diderot oppose des gens dâhumeur diffĂ©rente, mais plus par leur expressivitĂ© que par leur intĂ©rioritĂ©. La pensĂ©e de Diderot se cherche en sâexprimant ; le paradoxe est un instrument de la recherche intellectuelle. A bizarrerie apparente » l. 29, câest-Ă -dire seulement apparente ; B rĂ©pond comme vous et moi » l. 27 B se moque de sa propre activitĂ©. Le livre est sous le signe de la curiositĂ©, de la rĂ©flexion ; planche // parquet l. 27-28 lâactivitĂ© du voyageur est semblable Ă celle du philosophe ; lestĂ©, dâun bord⊠» l. 35-37 Ă travers Bougainville, on nous prĂ©sente une image du philosophe, contraire du philosophe misanthrope de Rousseau. Lâaventure de lâesprit vaut celle de la mer. Lecture non dogmatique de ce livre la civilisation est Ă la fois la pire et la meilleure des choses⊠et de mĂȘme la vie primitive. La philosophie = rĂ©flexion critique sur les activitĂ©s humaines. Nihil humanum a me alienum puto, disait TĂ©rence. Lire lâarticle Philosophe » de lâEncyclopĂ©die ; Diderot nâinstruit pas, il inquiĂšte et pose les problĂšmes. Ironie de Diderot sur le lest du vrai Français » les maths et un voyage autour du Monde ! A Que pensez-vous de son Voyage ? » l. 40 Notre vieux domicile » relativitĂ©. Double avantage pour les navigateurs cartes et sĂ»retĂ© dans les OcĂ©ans, et pour les curieux et les philosophes. Il ne dĂ©veloppe que le premier. Les lumiĂšres nĂ©cessaires » siĂšcle des LumiĂšres, connaissance et ouverture dâesprit. Ne peut voir que celui qui est prĂ©parĂ© Ă voir. Repris par philosophie ». Il faut aussi avoir le courage de dire des choses qui seront mal acceptĂ©es. VĂ©ritĂ© = sincĂ©ritĂ© ; il faut Ă la fois de la promptitude et son contraire, la patience. DĂ©sir de voir, de sâĂ©clairer / et dâinstruire » et non de sâinstruire », PlĂ©iade. Style sans apprĂȘt » l. 55-56 celui quâil veut donner au SupplĂ©ment. Chapitre I, p. 145-147 avez-vous vu le Tahitien »⊠vous le saurez » Le lecteur, par la 1Ăšre phrase, sâattend au procĂ©dĂ© de lâĆil neuf » Lettres persanes, LâIngĂ©nu⊠transportĂ© » l. 2 avec un complĂ©ment de personne = le plus grand dĂ©paysement. soit que⊠soit que⊠» = deux fois lâidĂ©e dâerreur, imposĂ©e volontairement on lui en eĂ»t imposĂ© » ou naturelle. Aotourou nâa quittĂ© Tahiti que parce quâon lâa trompĂ© ou quâil sâest trompĂ©. IdĂ©e selon laquelle chacun se trouve bien chez soi cf. l. 18-22. Lâusage commun des femmes » qui nâa jamais voyagĂ© nâimagine pas des mĆurs autres que les siennes. Mythe dâun communisme primitif, dĂ©jĂ prĂ©sent chez Platon. En rĂ©alitĂ©, plus les civilisations sont primitives, plus les mĆurs sont complexes et contraignantes cf. Levi-Strauss et lâethnologie moderne. sâennuyait » sens trĂšs fort = profonde mĂ©lancolie. Lâalphabet tahitien⊠» l. 14 prĂ©occupation du siĂšcle lâorigine des langues. Ce sont les tous premiers balbutiements de la linguistique cf. Genette. Rousseau Ă©crit un Essai sur lâorigine des langues. Diderot a raison sur un point le systĂšme phonĂ©tique dâune langue est une structure, un systĂšme clos ; il est donc trĂšs difficile de prononcer des phonĂšmes qui nâexistent pas dans sa propre langue ; mais il confond graphĂšmes et phonĂšmes ! Diderot, l. 18-25, indique quelle lecture on fait des rĂ©cits de voyage par goĂ»t de lâexotisme, ou pour se conforter dans la bonne opinion que lâon a de son pays. Au moment des Grandes dĂ©couvertes, on ne lisait pas de tels rĂ©cits. Ici l. 26-28, A sâamuse pour une fois, il est le plus intelligent. Assonance et allitĂ©ration quoi, croyez, croisse ». Presque une paronomase ! RĂ©ponse de B Diderot ne veut rien dĂ©montrer, son opinion nâest pas faite. Ce qui lâintĂ©resse, câest la quĂȘte. Voir le Neveu de Rameau. MalgrĂ© les coq-Ă -lâĂąne, un seul problĂšme lâĆil neuf. Concevoir » l. 37 parce que son langage ne sây prĂȘte pas. Lien Ă©troit de la pensĂ©e et du langage. Lignes 45 et suiv. 3 idĂ©es fausses. simplicitĂ© des sauvages ~ complexitĂ© des sociĂ©tĂ©s modernes. Or lâon sait lâextrĂȘme complexitĂ© des liens sociaux, fondĂ©e sur des millĂ©naires de culture, par exemple des AborigĂšnes ; comparaison entre lâhistoire des sociĂ©tĂ©s et lâhistoire biologique dâun individu, datant du 16Ăšme siĂšcle, et trĂšs Ă la mode. Grandeur et dĂ©cadence cf. Montesquieu⊠Or une sociĂ©tĂ© ne meurt pas de vieillesse, mais par Ă©limination ou accident invasionsâŠâŠ Diderot mĂ©lange une comparaison mĂ©canique or aujourdâhui on sait que les machines complexes marchent mieux et une comparaison biologique deux idĂ©es dĂ©battues par Rousseau et Diderot lors de lâemprisonnement de celui-ci Ă Vincennes. Rousseau en fait un usage philosophique Discours sur lâorigine de lâinĂ©galitĂ© ; Diderot les essaie, en fait un usage poĂ©tique et moral. Ă propos de la libertĂ© et de lâaliĂ©nation Pour Diderot, comme pour Rousseau, la libertĂ© est un sentiment innĂ© cf. Discours sur lâorigine de lâinĂ©galitĂ© ; or câest discutable. La libertĂ© est une conquĂȘte humaine ; elle est difficile, au point que beaucoup ne souhaitent pas ĂȘtre libres. Sentiment un instinct dont on prend conscience. MĂ©lange dâidĂ©ologie et de conquĂȘtes scientifiques ; le transformisme est dans lâair, avec des aspects dangereux. Ce qui est positif dans lâĆuvre de Diderot, câest la critique. On se rend ridicule, mais on nâest ni ignorant, ni sot, encore moins mĂ©chant pour ne voir jamais que la pointe de son clocher ». Diderot ne se fait aucune illusion sur lâidylle de la vie sauvage prosopopĂ©e de lâIndienne de lâOrĂ©noque. Aucune pensĂ©e nâest chez Diderot privĂ©e de son antithĂšse = aspect ludique. Il essaie toutes les idĂ©es cf. le Neveu de Rameau, jeu qui mĂšne Ă une critique de la rĂ©alitĂ©. Ici, les rapports sociaux entre les Parisiens du 18Ăšme siĂšcle sont des entraves » l. 51 ; mais on arrive Ă vivre ⊠Il en fait voir les dĂ©fauts et les qualitĂ©s cf. p. 186. Retour de la mĂ©taphore du brouillard Diderot veut remuer assez dâidĂ©es pour que le brouillard intellectuel dans lequel nous vivons se dissipe. A a-t-il tort ? il ne se laisse pas prendre aux fables il est le philosophe, lâesprit le plus fort ; les rĂŽles sont interchangeables. Ce qui diffĂ©rencie A et B, ce sont les traits dâhumeur. A est le souffre douleur de B humour jâai toujours tort avec vous ! » l. 66-67. De tenez, tenez » Ă vous le saurez » l. 69-75 mĂ©nage une transition avec la suite. Mise en abyme le SupplĂ©ment est pour nous lâĆuvre complĂšte, or il est dans lâĆuvre lĂ , sur cette table ». Jeu pictural baroque les MĂ©nines de VĂ©lasquez, puis théùtral lâIllusion comique, les Acteurs de bonne foi de Marivaux, enfin littĂ©raire, qui dĂ©truit la rĂ©alitĂ© en mĂȘme temps quâon la crĂ©e. Diderot sâamuse la sincĂ©ritĂ© de Bougainville⊠prouvĂ©e par un SupplĂ©ment apocryphe ! l. 57. Vous le saurez » souligne la gratuitĂ© de lâĂ©change dâidĂ©es le discours du vieillard est prĂ©sentĂ© comme faux, invraisemblable. repris plus tard, p. 151 abrupt et sauvage », dĂ©finition de la poĂ©sie pour Diderot Conclusion optimisme de Diderot. Toute sociĂ©tĂ© est mauvaise, mais toutes les sociĂ©tĂ©s sont bonnes dâun certain point de vue. Elles sont vivables. Jeu des idĂ©es. Le SupplĂ©ment se prĂ©sente comme une mĂ©ditation aprĂšs une lecture titre excellent quand un livre a du succĂšs, des quantitĂ©s de supplĂ©ments. Diderot surpasse Rousseau et sa ProsopopĂ©e de Fabricius ». RĂȘverie trĂšs libre aprĂšs la lecture. Distanciation Ă la Brecht pour critiquer quelque chose, il faut ĂȘtre dehors et dedans, acteur et tĂ©moin. DĂ©chirement de sâarracher Ă son pays fiction littĂ©raire pour cela, pour libĂ©rer lâesprit. Cf. lâIngĂ©nu de Voltaire ! Au 18Ăšme siĂšcle, on dĂ©teste les livres ennuyeux. Discours du vieillard tahitien chapitre II p. 148-151 Les EuropĂ©ens vus par le vieillard chef des brigands » ; opposition des personnes nous » ~ tu » ; fureur / fĂ©roce. Fureur et violence vocabulaire de la violence cf. ci-dessus, + haĂŻr, Ă©gorger, sang »⊠PropriĂ©tĂ© et vol mettre des hommes en esclavage l. 15-16 ; tâemparer comme de la brute » propriĂ©tĂ© du sol ~ vol de toute une contrĂ©e FacticitĂ©, superficialitĂ©, superflu, mensonge prĂȘchĂ© », l. 6-7 ; inutiles lumiĂšres » Le problĂšme du travail. Autoportrait du Sauvage opposition dâun systĂšme de valeurs Ă un autre. Absence de propriĂ©tĂ© privĂ©e tout est Ă tous », y compris filles et femmes. Pas dâagressivitĂ© ce sont les EuropĂ©ens qui enseignent la violence ». EgalitĂ© des hommes Ton frĂšre », deux enfants de la Nature » Sentiment de la justice, dignitĂ© RĂ©ciprocitĂ©, l. 18-22, 23-26, 27-30. Sagesse des moeurs cf. le dernier § ĂȘtres sensĂ©s » l. 46 HospitalitĂ© tu as partagĂ© », tu es entrĂ© dans nos cabanes »⊠Une image de lâEtat de Nature. Il sâagit ici dâune fiction discours Ă lâoccidentale ce qui sera soulignĂ© par A et B ; aucun dĂ©tail concret ce nâest pas la civilisation tahitienne qui intĂ©resse Diderot, mais un IDEAL, qui appartient au mythe du Bon Sauvage. PropriĂ©tĂ© collective ou absence de propriĂ©tĂ© cf. Rousseau ; il sâagit dâun Ă©tat antĂ©rieur Ă la propriĂ©tĂ©. Cependant, on ne trouve pas ici les mĂȘmes consĂ©quences que dans le Discours sur lâinĂ©galitĂ© de Rousseau ; chez celui-ci, lâhomme dâavant la sociĂ©tĂ© vivait isolĂ© ; pour Diderot, il y a une forme de sociĂ©tĂ© collectiviste primitive. Le problĂšme du travail satisfaction des besoins vitaux ~ luxe, besoins superflus idĂ©e importante de crĂ©ation des besoins ». Lâopposition entre repos et travail est une opposition de valeur repos = ĂȘtre = jouir travail = sâagiter, se tourmenter pour possĂ©der des biens. On est ici trĂšs proche de Montaigne et de Rousseau, mais trĂšs loin de Voltaire, qui prĂ©figure la valeur bourgeoise accordĂ©e au travail, Ă lâindustrie. Dialogue de lâAumĂŽnier et dâOrou ch. III, p. 157-160, de ces prĂ©ceptes singuliers » à ⊠ne rĂ©clame pas ses droits » texte 3 Plan du premier discours dâOrou les prĂ©ceptes de lâaumĂŽnier chastetĂ©, fidĂ©litĂ©, mariage⊠sont Ă la fois contraires Ă la nature et Ă la raison. Contraires Ă la nature un ĂȘtre humain ne saurait appartenir Ă un autre contraires Ă la âloi gĂ©nĂ©rale des ĂȘtresâ dans un univers soumis au changement, aucune loi ne peut imposer une constance Ă©ternelle. Magistrats et prĂȘtres ne peuvent dĂ©finir le bien et le mal, Ă©dicter des lois contraires Ă la nature des hommes ne peuvent dĂ©cider du bien et du mal si câĂ©tait le cas, ces notions seraient arbitraires et changeantes allusions aux lois et interdits religieux ⊠Et que faire en cas de dĂ©saccord entre ces diffĂ©rents lĂ©gislateurs ? ==> seule la nature peut dĂ©cider du bien et du mal, en fonction de critĂšres absolus. Le deuxiĂšme discours dresse un rĂ©quisitoire contre la sociĂ©tĂ© Orou devine ce que Diderot dĂ©nonce les nĂ©cessaires dysfonctionnements liĂ©s Ă des lois contraires Ă la nature. Dans ce passage, Ă©tudier les marques de jugement les procĂ©dĂ©s oratoires symĂ©tries, antithĂšses, accumulations, rythmes⊠lâusage des temps verbaux Apologue de Polly Baker Qui parle ? Retrouvez dans cette histoire les marques dâĂ©nonciation marques personnelles, marques de jugement, modalisateurs, dĂ©ictiques⊠; indiquez les diffĂ©rents niveaux dâĂ©nonciation le narrateur de lâhistoire le discours de Polly Le discours de Polly indiquez sa composition. Montrez, en relevant plusieurs indices, quâil sâagit dâun plaidoyer. Pour quelle cause plaide Polly ? En quoi lâhistoire de Polly Baker constitue-t-elle un apologue ? Quelle en serait la moralitĂ© ? Quel rĂŽle occupe cet apologue dans lâargumentation de Diderot Ă propos des lois naturelles ? Excipit ainsi vous prĂ©fĂ©reriez⊠=> fin du chapitre V. La 1Ăšre phrase fait la liaison avec ce qui prĂ©cĂšde. prĂ©fĂ©reriez » interrogation implicite. A doute des idĂ©es de B conditionnel. Il ne sâagit pas ici dâun choix, mais dâune prĂ©fĂ©rence, comme si le choix Ă©tait indiffĂ©rent, affaire de goĂ»t. Conclusion du dialogue vocabulaire du choix moral prĂ©fĂ©rer, prononcer, conclure, incliner, trouver, indiquer => unitĂ© de la page. Les tabous les plus forts de notre sociĂ©tĂ© sont ceux concernant la sexualitĂ© Diderot sây attaque ; cf. la 3Ăšme partie du RĂȘve de dâAlembert. LâĂ©tat de nature brute cf. Discours sur lâorigine de lâinĂ©galitĂ© de Rousseau 1755. Cette question marque lâĂ©tonnement. Cf. au dĂ©but est-ce que vous donneriez dans la fable de Tahiti ? » p. 146. Ma foi » prĂ©cĂšde et attĂ©nue lâĂ©nonciation de vĂ©ritĂ©s scandaleuses. Expression ironique de la pensĂ©e se dĂ©pouiller », puis se vĂȘtir » l. 3-6. Arguments de faits, mĂȘme sâils sont totalement contradictoires. Equation toujours Ă©gale en augmentant les plaisirs dâune sociĂ©tĂ©, on en augmente dans la mĂȘme proportion les maux beaucoup de peine pour rien efforts » l. 11. DerriĂšre lâopposition homme naturel / homme social se cache lâopposition individu / sociĂ©tĂ©. Diderot renouvelle cette opposition par celle individu / espĂšce. Avantage Ă lâĂ©tat de nature. Mais argument contraire cependant », l. 15 la vie civilisĂ©e allonge la durĂ©e moyenne dâexistence. Il reprend souvent cet argument, mais nâhĂ©site pourtant pas, ici, Ă le contester est-ce une norme ? comparaison avec une machine Lieu oĂč lâon est le plus libre, sans tabous Tahiti vision utopique de la vie primitive⊠⊠mais aussi Venise ! Diderot retrouve Voltaire et prĂ©sente les deux aspects antagonistes du progrĂšs. Prudence il mâest souvent venu dans la pensĂ©e⊠», peut-ĂȘtre »⊠La conception dâune durĂ©e moyenne de vie est toute nouvelle Ă lâĂ©poque argument au dĂ©part dâun dĂ©bat qui dure aujourdâhui encore cf. LĂ©vy-Strauss. Diderot prĂ©sente des arguments pour et contre, et se garde de choisir. Ligne 21 retour du conditionnel. Je vois » signifie dois-je voir ? » Parcourrai » = par lâesprit. Diderot pose le problĂšme de bonheur, et le fait comme le ferait Rousseau, pour qui tout va bien si lâhomme est heureux. Il nâen est pas de mĂȘme pour Voltaire lâessentiel est que la condition de lâhomme soit supportable ; cf. Candide ; Rousseau est plus exigeant, mais aussi plus optimiste que Voltaire ! Venise » reprĂ©sente Ă lâĂ©poque le gouvernement dâoppression aristocratique. Ces arguments sont fragiles, mais Diderot ne rĂ©siste pas au plaisir de les essayer. Je ne mâattendais pas Ă lâĂ©loge de ce gouvernement » = litote. Diderot prĂ©sente un paradoxe Ă©norme dire que le meilleur gouvernement dâun pays civilisĂ© serait comparable Ă celui de Venise. Diderot, ~ Rousseau, ignore la pensĂ©e dialectique. Pourtant, ici, il en est tout proche. Les Grecs proscrivirent⊠» Diderot reprend ici Montaigne I, ch. 23. Partout oĂč il y a des lyres, il y a des cordes = mĂ©taphore partout oĂč il y a une sociĂ©tĂ©, il y a des lois arbitraires. Diderot cite ensuite des personnages connivence avec les lecteurs de son Ă©poque Reymer, Gardeil figures atroces, Ă©quilibre entre les sexes un homme, une femme. TaniĂ©, Mlle de la Chaux ce quâil y a de sublime dans le dĂ©vouement amoureux ; Le Chevalier Desroches homme admirable, mais incapable de sâattacher sĂ©rieusement Ă une femme ; Mme de la CarliĂšre femme admirable, mais qui a trop lu la Princesse de ClĂšves. La morale artificielle produit chez lâhomme le meilleur et le pire. dĂ©pravation » nĂ©gatif et malheur connotĂ© plus positivement. Diderot a pris des personnages fictifs, pour renvoyer Ă sa propre Ćuvre. Nous parlerons⊠» l. 61 style et pensĂ©e de Montaigne. RĂ©former » = changer complĂštement. Celui qui⊠» l. 63 = pensĂ©e de Socrate Criton qui meurt pour garantir les lois. Il faut obĂ©ir aux lois, non parce quâelles sont justes, mais parce quâelles sont les lois. Etres fragiles » les Tahitiens. Leur sociĂ©tĂ© est fragile, il ne faut pas y toucher. Le philosophe est prĂ©sentĂ© comme un ĂȘtre sociable, non rĂ©volutionnaire. Retour l. 79 du brouillard mĂ©taphorique il tombe, il nây a eu quâune Ă©claircie. Le dialogue se termine par une pointe. Pour comprendre le SupplĂ©ment, il faut lire Sur les femmes, qui prolonge la rĂ©flexion de Montaigne sur le mĂȘme sujet. Lire aussi le passage sur le sublime dans le Neveu de Rameau. Le SupplĂ©ment au Voyage de Bougainville a-t-il une dimension ethnographique ? Dialogue entre A et B Ă propos de Bougainville, p. 142-144 27-30 Pour ĂȘtre un bon explorateur, il faut dâabord de solides connaissances scientifiques, et en particulier mathĂ©matiques un vĂ©ritable Français, lestĂ© [âŠ] dâun traitĂ© de calcul diffĂ©rentiel et intĂ©gral⊠» ; il faut en outre de la philosophie, du courage, de la vĂ©racitĂ© », des qualitĂ©s dâobservation, de la curiositĂ©, et des connaissances scientifiques mĂ©canique, gĂ©omĂ©trie, astronomie, histoire naturelle. Rien nâest dit de la connaissance des hommes lâethnographie est encore en train de naĂźtre. Les premiĂšres observations rapportĂ©es portent sur les animaux sauvages p. 143, puis sur ce que nous appellerions aujourdâhui la dĂ©rive des continents. Elles concernent donc la zoologie et la gĂ©ographie. Ă propos de lâĂle des Lanciers, Diderot mentionne le cannibalisme et lâinfibulation des femmes, pures hypothĂšses ici, et quâil attribue Ă la nĂ©cessitĂ© vitale de rĂ©duire la population dans un espace trop petit. Il sâagit ici de spĂ©culations, et non dâobservations. Ă propos des Patagons OĂč se trouve la Patagonie ? Quelle observation de Bougainville est ici rapportĂ©e ? Avec quelles rĂ©serves ? Montez que lâon trouve ici une premiĂšre occurrence du mythe du bon Sauvage ». La Patagonie se trouve Ă lâextrĂȘme sud du Chili ; Diderot rapporte lâobservation de Bougainville sur le physique Ă©tonnant de ces hommes, mais il met en doute la vĂ©racitĂ© de ce rapport, exagĂ©rĂ© selon lui cf. p. 145/34. Le mythe du bon Sauvage » apparaĂźt dans ce mĂȘme passage Câest, Ă ce quâil paraĂźt, de la dĂ©fense journaliĂšre contre les bĂȘtes fĂ©roces quâil tient le caractĂšre cruel quâon lui remarque quelquefois. Il est innocent et doux, partout oĂč rien ne trouble son repos et sa sĂ©curitĂ© . A propos dâAotourou quâest-ce que la fable de Tahiti » ? Quelle est la part de lâobservation ethnographique ici ? La fable de Tahiti » consiste Ă croire que la sociĂ©tĂ© Tahitienne, qui reprĂ©sente lâenfance de lâhumanitĂ© », soit simple et innocente. Lâethnographie contemporaine a au contraire montrĂ© la complexitĂ© extrĂȘme des sociĂ©tĂ©s dites primitives â et leur anciennetĂ©. Lire Ă ce sujet Tristes Tropiques, de Claude LĂ©vi-Strauss. On trouve cependant dans ce passage une petite part dâobservation ethnographique sur la langue tahitienne bien que Diderot semble confondre Ă©criture et phonĂ©tique, sur lâusage commun des femmes », et sur la difficultĂ© Ă concevoir une rĂ©alitĂ© que lâon ne peut nommer Umberto Eco a fait la mĂȘme remarque Ă propos de Moctezuma dans Kant et lâOrnithorynque, Grasset, Paris, 1997, p. 131 et suiv.. Discours du vieillard tahitien, p. 147-151 39-47 Relevez dans ce discours tout ce qui peut donner une idĂ©e des mĆurs, coutumes, objets usuels⊠de la sociĂ©tĂ© tahitienne. Diderot donne-t-il une image prĂ©cise de ces usages ? habitat, Ă©conomie, fĂȘtes, religion, arts⊠Lâon retrouve ici lâusage commun des femmes, quelques mots sur lâhabitat nos cabanes », les armes arcs et flĂšches, le mode de vie goĂ»t du repos, absence de maladies, et une allusion Ă une cĂ©rĂ©monie de passage Ă lâĂąge nubile pour les jeunes filles la mĂšre relĂšve le voile » de la jeune fille. Aucun de ces points nâest dĂ©veloppĂ© ; repos et santĂ© semblent se rĂ©fĂ©rer au mythe du paradis terreste » ou de lâĂąge dâor, et les autres mentions sont si gĂ©nĂ©rales quâelles pourraient sâappliquer Ă nâimporte quelle sociĂ©tĂ© non europĂ©enne. Diderot reste dans le flou pour plusieurs raisons Pour donner un caractĂšre dâuniversalitĂ© au discours du vieillard, dont A souligne peu aprĂšs quâil semble bien peu rĂ©aliste dans la bouche dâun vieillard tahitien, en principe non formĂ© Ă lâĂ©loquence romaine ; parce que le but est la dĂ©nonciation de la sociĂ©tĂ© europĂ©enne, et non la peinture de la sociĂ©tĂ© tahitienne ; il ne faut donc pas disperser lâattention du lecteur ; enfin, parce quâil faut donner de cette sociĂ©tĂ© tahitienne une image idĂ©ale, en gommant des rĂ©alitĂ©s qui pourraient lui ĂȘtre moins favorables. Dialogue entre Orou et lâaumĂŽnier, 1Ăšre partie, p. 153-160 53-62 Quâapprenons-nous sur les mĆurs tahitiennes ? Dans quel domaine se situent les observations rapportĂ©es par Diderot ? Nous apprenons les rĂšgles dâhospitalitĂ© lâhĂŽte se voit offrir lâĂ©pouse et les filles de celui qui le reçoit ; lâon apprend Ă©galement quâavoir un enfant hors de tout lien de mariage, loin dâĂȘtre un dĂ©shonneur, est ici une chance, et que ces enfants constituent une partie de la dot ; que le mariage en Tahiti nâest pas conclu pour une vie entiĂšre, mais se rompt dĂšs que les Ă©poux le souhaitent ; en somme que les Tahitiens jouissent de la plus grande libertĂ© sexuelle. LâintĂ©rĂȘt de Diderot porte donc essentiellement sur les relations interpersonnelles et familiales. Que pouvons-nous dĂ©duire des questions et des remarques dâOrou sur la sociĂ©tĂ© europĂ©enne ? â notamment en matiĂšre de religion et dâinstitutions. On peut dĂ©duire des questions dâOrou que Tahiti ignore les prĂȘtres, et les magistrats, et nâa quâune idĂ©e trĂšs approximative de la notion de Dieu. Diderot imagine donc une sociĂ©tĂ© tahitienne trĂšs proche de ce que lâon pensait ĂȘtre lâĂ©tat de nature » une sociĂ©tĂ© sans lois, sans institutions rĂ©pressives, sans prĂȘtres ni religion autre que naturelle »⊠Il sâagit bien entendu dâune utopie. Dialogue entre Orou et lâaumĂŽnier, 2Ăšme partie p. 161-165 62-66 Quâapprenons-nous sur lâorganisation sociale, lâĂ©conomie ? il sâagit dâune sociĂ©tĂ© rurale, p. 161 un agriculteur, un pĂȘcheur, un chasseur⊠» de type matriarcal une femme emmĂšne avec elle ses enfants quâelle avait apportĂ©s en dot ». sur les relations familiales des relations assez Ă©galitaires entre lâhomme et la femme au sein du couple ; mais la femme semble avoir essentiellement pour rĂŽle dâavoir des enfants. sur la place de lâenfant dans la sociĂ©tĂ© tahitienne lâenfant est au centre de la sociĂ©tĂ© tahitienne toujours considĂ©rĂ© comme un bien, il nâest jamais objet dâopprobre, ni abandonnĂ©. sur les cĂ©rĂ©monies la plus importante semble ĂȘtre celle qui consacre le passage de lâenfance Ă lâĂąge nubile, pour les garçons et les filles grande fĂȘte, au cours de laquelle les jeunes gens peuvent se choisir un partenaire p. 163-164 / 65-66 Tout lâintĂ©rĂȘt de Diderot porte donc, ici encore, sur la question de la libertĂ© sexuelle, du mariage, et des relations familiales. La description quâil donne de la cĂ©rĂ©monie Ă©voque des fĂȘtes de lâĂąge dâor, et une sociĂ©tĂ© plus mythique que rĂ©elle. LĂ encore, lâethnographie contemporaine rapporte plutĂŽt des rĂšgles de mariage extrĂȘmement contraignantes, et des liens de parentĂ©s trĂšs compliquĂ©s dans les sociĂ©tĂ©s dites primitives, telles que les indiens du BrĂ©sil Tristes Tropiques Dialogue entre Orou et lâaumĂŽnier, 3Ăšme partie p. 167-177 71-80 Quels sont les interdits dans la sociĂ©tĂ© tahitienne ? Comment sâexpriment-ils ? Comment leur transgression est-elle chĂątiĂ©e ? La sociĂ©tĂ© tahitienne vous semble-t-elle rĂ©pressive ? Les interdits touchent tout ce qui a trait Ă des relations sexuelles non fĂ©condes avec des personnes stĂ©riles, pendant la pĂ©riode des rĂšgles ou durant la grossesse. Ceux qui transgressent ces interdits nâencourent pas dâautre chĂątiment que le blĂąme la sociĂ©tĂ© tahitienne ignore la rĂ©pression ! Quels tabous sont ignorĂ©s de la sociĂ©tĂ© tahitienne ? Diderot vous semble-t-il approuver cette ignorance ? Les Tahitiens, selon Diderot, ignorent lâadultĂšre puisquâon peut rompre un mariage Ă volontĂ© et lâinceste, qui ne blesse en rien la nature » â on ignorait les dangers de la consanguinitĂ© ! Aux yeux de Diderot, de tels interdits, non fondĂ©s en raison, sont absurdes. Cette description des mĆurs tahitienne vous semble-t-elle relever de lâobservation scientifique, ou de la fable de Tahiti » ? Cette description semble relever davantage dâune observation superficielle, et dâune utopie, que dâune observation sĂ©rieuse de la sociĂ©tĂ© tahitienne ; lâabsence dâinstitutions, de religion, de tabous ne plaide pas en faveur dâune rĂ©elle observation. Mais la fonction de ce texte nâest pas de nature ethnographique il sâagit seulement de construire une utopie, dont le but est de proposer un contre-modĂšle de la sociĂ©tĂ© europĂ©enne, et de dĂ©noncer les tares de celle-ci ; dĂšs lors, il importe peu que lâimage de la sociĂ©tĂ© tahitienne soit conforme Ă la rĂ©alitĂ© ; il suffit quâelle ne contredise pas les observations des navigateurs, et quâelle soit cohĂ©rente. Les philosophes ne sâintĂ©ressent pas rĂ©ellement Ă la sociĂ©tĂ© quâils observent, moins en tous cas que Montaigne cf. le chapitre Des Cannibales » I, 31 celui-ci allait jusquâĂ sâintĂ©resser Ă la nourriture, aux vĂȘtements⊠Rien de tel chez Diderot, ni, on le verra, chez Voltaire LâIngĂ©nu il sâagit simplement de donner un contre-modĂšle de la sociĂ©tĂ© française, positif chez Diderot, nĂ©gatif chez Voltaire. DâoĂč le peu dâintĂ©rĂȘt pour les objets concrets, les coutumes, les institutions chez Diderot, on pourrait croire quâil nây a pas de gouvernement, ni de chefs ! et lâart de ces peuples le mot nâest mĂȘme pas mentionnĂ©, ni chez Voltaire, ni chez Diderot ! Le vrai Bougainville Ă Tahiti Biographie NĂ© Ă Paris en 1729, Louis Antoine de Bougainville Ă©tait un navigateur. Le 12 Octobre 1754, il est nommĂ© secrĂ©taire dâambassade Ă Londres. Premier aide de camps de Montcalm en 1756 aux cĂŽtĂ© de qui il combattit aux plaines dâAbraham en 1759, il devint capitaine de frĂ©gate en 1753 et tenta en vain de coloniser les Ăźles malouines1763-1765. En 1766, il partit de Brest Ă bord de la frĂ©gate la Boudeuse, gagna lâAmĂ©rique du sud et le dĂ©troit de Magellan, atteignit Tahiti en 1768 oĂč il resta 10 jours. Le 15 mai 1771, il publia le rĂ©cit de son voyage autour du monde qui dĂ©veloppa le mythe du paradis polynĂ©sien . RentrĂ© Ă St Malo en 1769, Bougainville, premier capitaine français Ă avoir effectuĂ© le tour du monde, fut promu chef dâescadre en 1779 et resta fidĂšle Ă Louis XVI lors de la rĂ©volution. Il mourut Ă Paris en 1811. Le SupplĂ©ment au voyage de Bougainville de Diderot Le SupplĂ©ment au voyage de Bougainville est le troisiĂšme texte dâune sĂ©rie composĂ©e par Diderot en 1772 et conçue comme un ensemble Ceci nâest pas un conte Madame de CarliĂšre et le SupplĂ©ment au voyage de Bougainville. Le SupplĂ©ment se prĂ©sente comme une mĂ©ditation aprĂšs une lecture. Le texte de Diderot apparaĂźt comme un dĂ©bat dâidĂ©es. Câest une rĂ©flexion philosophique sur les questions que Diderot se posait en ce qui concerne les lois naturelles. En mettant en scĂšne un dĂ©bat entre un sauvage et un europĂ©en, Diderot, grĂące Ă la double Ă©nonciation, exprime ses idĂ©es philosophiques sur la sociĂ©tĂ© dite » civilisĂ©e . Bougainville Ă Tahiti Tahiti, un paradis terrestre Bougainville dĂ©couvre Tahiti et ses habitants. Lorsquâil arrive sur lâĂźle, il la voit comme le paradis sur Terre. Cf. p235 » Je me croyais transportĂ© dans le jardin dâEden Il garde le souvenir dâun endroit magnifique oĂč les gens sont gentils, accueillants. Pour lui, câest une nouvelle dĂ©finition du bonheur. La population tahitienne Un accueil animĂ© qui surprend dans le bon sens les EuropĂ©ens Bougainville insiste sur la gentillesse des tahitiens. Cf. p 229 nous fĂ»mes reçus par une foule immense dâhommes et de femmes » Il insiste beaucoup sur le fait quâils venaient en grand nombre pour les accueillir en utilisant les mots qui gĂ©nĂ©ralisent. Cf. p 231 » Le chef et tout le monde » ; » tous les hommes, toutes les femmes » ; » tous ceux Personne nâest laissĂ© au hasard pour Bougainville, câest une gentillesse gĂ©nĂ©rale. Les Tahitiens sont heureux de recevoir les EuropĂ©ens et ça se sent par leur hospitalitĂ©. Ils les invitent dans leur maison. 229 » Le chef de ce canton nous conduisit dans sa maison et nous y introduisit » Ils leur donnent Ă manger. Cf. » Le chef nous proposa ensuite de nous asseoir sur lâherbe,âŠoĂč il fit apporter des fruits, du poisson grillĂ© et de lâeau . Et surtout, ils leur offrent des jeunes filles. Cf. p 226 » ils nous pressaient de choisir une femme, de la suivre⊠» On peut dire que le mot clef, ici, câest lâhospitalitĂ©. Les EuropĂ©ens ont Ă©tĂ© trĂšs Ă©tonnĂ©s par la beautĂ© et la simplicitĂ© des habitants. Le naturel des habitants. Ils nây a aucune pudeur, ils ne cachent rien. Ils ont la rĂ©putation dâĂȘtre curieux. Ils ne se lassent pas de les considĂ©rer. Cf. p 227 » Ce peuple qui examinait en tumulte toutes les parties de son corps » ; » AprĂšs lâavoir bien considĂ©rĂ© ils lui rendirent ses habits Ils ne se cachent pas de cette curiositĂ©. Certains nâhĂ©sitaient pas Ă venir les toucher, Ă©carter leur vĂȘtements. Ils tenaient Ă savoir si ils Ă©taient tous identiques Ă eux. Ils ne sont pas embarrassĂ©s et nâhĂ©sitent pas Ă sâexhiber. Cf. p 225 » La plupart de ces nymphes Ă©taient nues, car les hommes et les vieilles, qui les accompagnaient, leur avaient ĂŽtĂ© la pagne dont ils Ă©taient ordinairement elles sâenveloppent . Les femmes se donnent naturellement aux hommes. Ils nâexpriment aucune crainte, aucune mĂ©fiance. En effet, ils ne portent pas dâarmes, sont pacifiques et nâhĂ©sitent pas Ă se promener seuls ou en petits groupes. » Quatre insulaires vinrent avec confiance souper et coucher Ă bord » » Aucun ne portaient dâarmes ni mĂȘme de bĂąton » Ils vivent simplement et dans la nature toute la journĂ©e. Ils ne travaillent pas, tout est Ă leur leur portĂ©e. On a vraiment une idĂ©e du paradis. Bougainville parle du caractĂšre doux de la nation. Impression dâĂȘtre dans le jardin dâEden. Absence de mĂ©fiance et de haine. Ils vivent en groupe au quotidien, sont trĂšs unis. Ils partagent tout, ils nây a pas de jalousie. Les hommes et les femmes sont Ă©gaux, on ne fait pas de distinctions sauf pour le vieillard. Il reprĂ©sente la voix de la sagesse donc il est plus considĂ©rĂ© que les autres habitants. Ils vivent en harmonie entre eux. Bougainville a tendance, peut-ĂȘtre, Ă idĂ©aliser toute cette rĂ©alitĂ©. cela semble trop beau pour ĂȘtre vrai. *Il ne semble pas rĂ©gner de guerre civile par contre ils sont toujours en guerre avec les Ăźles voisines Une nature parfaite. Les tahitiens jouissent de ce que la nature leur donne. Cf. La terre se jonchait de feuillages et de fleurs » ; » La nature berce Ă pleine mains » La nature offre tout donc lâhomme nâa plus rien Ă faire. Câest la perfection absolue, Bougainville ne voit aucun inconvĂ©nient. Une fois de plus, peut-ĂȘtre a-t-il tendance Ă idĂ©aliser cette vie. Un lieu sain. On y vit trĂšs longtemps, on ne travaille pas ou trĂšs peu et on a tout ce que lâon veut. Câest comme si la vieillesse nâexistait pas. Par exemple, le vieillard nâa de signe de vieillesse que sa couleur de cheveux et pas dâautres marques de dĂ©crĂ©pitude. Contrairement Ă ce qui se passe en Europe, la vieillesse ne laisse pas de trace Ă Tahiti. Les personnages communs Ă Diderot et Bougainville. Aotourou est le tahitien qui est allĂ© en Europe avec Bougainville. Chez Diderot, B dit Ă A que Aotourou sâennuyait avec les EuropĂ©ens. Cf. p 36 » Il sâennuyait parmi nous » Alors que Bougainville, lui, dit expressĂ©ment le contraire. Cf. p 263 » Il y est restĂ© onze mois, pendant lesquels il nâa tĂ©moignĂ© aucun ennui » Cf. p 264-265 » Le seul de nos spectacles qui lui plĂ»t Ă©tait lâopĂ©ra ;car il aimait passionnĂ©ment la danse . Donc le personnage est le mĂȘme chez les deux auteurs mais Bougainville et Diderot diffĂšrent sur Aotourou et sur son sĂ©jour en Europe. Le vieillard est le pĂšre du chef Ereti celui qui accueille Bougainville. Les deux auteurs sont dâaccord sur le physique et le comportement du vieillard face aux Ă©trangers. Mais chez Bougainville, le vieillard nâapparaĂźt quâĂ lâarrivĂ©e des EuropĂ©ens. Jamais il ne fait ses adieux comme chez Diderot. Diderot fait dialoguer et dĂ©battre un sauvage, Orou, et le reprĂ©sentant de la pensĂ©e europĂ©enne lâaumĂŽnier. Cependant, Ă la diffĂ©rence du texte original, le dĂ©bat ne porte que sur un thĂšme la morale sexuelle. Bibliographie Montaigne Des Cannibales Essais I, 31 Louis-Antoine de Bougainville Voyage autour du monde Ă©ditions Pockett lire en particulier la seconde partie, chapitres II et II sĂ©jour Ă Tahiti Jean-Claude CarriĂšre La Controverse de Valladolid Vivant Denon Point de lendemain Ă©dition Librio Diderot La Religieuse Diderot Les Bijoux indiscrets Laclos Les Liaisons dangereuses Claude LĂ©vi-Strauss Tristes Tropiques lire en particulier les parties six, sept et huit, consacrĂ©es aux Indiens Bororo, Nambikwara et Tupi-Kawahib. Rousseau Discours sur lâorigine de lâinĂ©galitĂ© parmi les Hommes Jean-Christophe Ruffin Rouge BrĂ©sil, Gallimard, 2001. Voltaire LâIngĂ©nu
Discoursdu vieillard, Supplément au voyage de Bougainville, Diderot : analyse. Voici un commentaire du « discours du vieux tahitien », extrait du chapitre 2 du Supplément au voyage de Bougainville de Diderot ( publié